Par Antoine Delarue
La génération Y monte en ligne pour le financement de nos futures retraites. Comment va-t-elle assumer cette charge ? Peut-elle se retrouver dans le pacte intergénérationnel qui lui est proposé ? Rien n’est moins sûr.
La génération de toutes les promesses et de tous les dangers
La génération Y est duale. Côté pile, des preneurs de risque, mobiles, avides de nouveautés et d’expériences multiples et mordant la révolution numérique à pleine dents. Un exemple de ce qu’elle peut apporter : aux Finances, un Hakaton sur les codes source des logiciels de l’IRPP a ramené le temps d’une simulation complète de un mois à …23 minutes, le tout en une après-midi de travail d’une poignée de bénévoles ! Côté face, une masse de « nift », ces jeunes sans formation ni emploi ni perspective au-delà de l’auto entreprenariat à la Uber !
En commun : des parcours pluriels, alternant différents statuts (public, privé, indépendants divers) et hachés d’interruptions et rebonds, subis ou voulus. A côté du salaire, d’autres modes de rémunération, souvent contingents au risque économique assumé, qui n’en ont plus la prédictibilité ni la visibilité. Fragmentation et volatilité caractérisent aussi leurs parcours conjugaux, transformant le contexte de la solidarité familiale.
Le système actuel : une offre jadis performante, maintenant en porte à faux
Nos régimes de retraite se sont au contraire conçus pour des carrières linéaires à revenus stables. Leur pluralité est l’héritage d’une construction progressive ayant accompagné la généralisation du salariat du public jusqu’au privé. Chacun de ces « silos » privilégie ses carrières longues, assurant alors haut niveau de couverture et forte redistribution interne.
Les parcours pluriels perdent, eux, la lisibilité sur leur future retraite et souvent l’accès à ces filets de sécurité, un paradoxe pour une génération qui se met déjà le plus en risque économique
Les réformes paramétriques ne font qu’accentuer le décalage
Aux menaces sur la pérennité financière du dispositif ont répondu des durcissements successifs des paramètres clefs : âge de départ ou durées de cotisation minimum, sans voir l’inadéquation qualitative croissante avec les besoins et attentes de la génération Y. Faute d’équité et de lisibilité, les entreprenants auront la tentation d’aménager leur assiette cotisable, voire de s’expatrier, tandis que faute de protection contre le risque économique, les nift s’installeront dans le renoncement passif.
Comment rétablir la confiance dans la répartition ?
Le fonctionnement en points fournit une piste solide, car garantissant par construction équité contributive et lisibilité. La pluralité de régimes de retraite peut être conservée pourvu que les conditions de liquidation des différents points soient harmonisées. Des innovations répondant aux attentes des Y pourront alors être introduites : la retraite par étape qui ouvrira la voie à des secondes carrières très populaires ; le pré-partage des droits conjugaux qui protègera efficacement les survivants d’unions fragmentées.
Comment assurer une protection dynamisante contre la précarité ?
A ces régimes contributifs s’ajoutera un régime transversal de solidarité (RTS) servant des suppléments aux situations méritantes (type enfants élevés) ou fragiles. Le suivi des trimestres validés en fournira une base égalitaire. Il permettra d’anticiper de façon proactive tous les actifs « à risque » et de leur proposer des parades adaptées (formation, rachats de trimestre, etc..) selon des modalités à inventer.